Présentation

Pourquoi ce titre bizarroïde, "S" obéit et "R" agit"
C'est tout simplement la transcription phonétique de l'épellation de mon nom de famille dont j'ai dû, des milliers et des milliers de fois au cours de mon existence, nommer successivement chacune des lettres qui le composent :
S - O - B - I - E - R - A - J
En insistant sur le "J" et en précisant "comme joie" car, à tous les coups, la personne qui inscrivait mon nom sur tel ou tel document le terminait machinalement par "ge".

Je m'appelle donc Sobieraj, François pour les dames et les amis, et je suis venu au monde le dimanche 15 juin 1941 à Chatou, dans la proche banlieue ouest de Paris, sous l'occupation allemande, à l'époque du rationnement, des tickets d'alimentation et du marché noir. 
Mes parents ont quitté leur Pologne natale dans les années 20 pour venir gagner leur vie en France et se sont retrouvés ouvriers d'usine à la fonderie Cromback de Rueil-Malmaison, le vestibule de l'enfer. 
Mon père est décédé alors que j'avais quatre ans. Je ne l'ai donc pratiquement pas connu mais d'après ce que j'ai entendu dire à son sujet, c'était quelqu'un de bien. 
Ma mère ne s'est jamais remariée et cette maîtresse femme, courageuse et autoritaire, m'a élevé seule ainsi que mes deux frères, Stanislas et Edmond, plus âgés que moi. 
Je n'ai pas été un fils à papa.

Photo de famille, le jour de mon baptême.

A l'école communale Paul Bert de Chatou où j'ai passé toute ma jeunesse, depuis la maternelle jusqu'à l'année du brevet, j'ai dû, pour satisfaire la fierté sans borne de ma mère et par crainte de la décevoir, être toujours le premier de la classe. 
A la fin, mes résultats scolaires s'étant quelque peu dégradés, j'ai décidé, par amour propre, de quitter l'école et la maison. 
Fugue dans le midi où, grâce à un bon coup de crayon, j'ai trouvé mon premier emploi : décorateur chez Jaque Sagan, à l'époque l'un des grands noms de la céramique d'art de Vallauris
J'avais quinze ans... 

Ma mère m'ayant retrouvé et pardonné, j'ai accepté de revenir au bercail, tel le fils prodigue. 
Mes études terminées, j'ai trouvé un petit boulot d'employé de bureau chez Strauss-Vonderweidt, quincailliers en gros à Saint-Germain en Laye, avec un salaire de misère et chaque jour quatre heures de trajet aller et retour à pied et en train. J'ai tenu près de deux ans. 



Puis j'ai trouvé un emploi mieux rémunéré d'aide-chimiste au laboratoire de recherches de l'usine "La Cellophane" à Bezons. Où la direction m'a vivement conseillé de suivre des cours du soir à l'école de chimie de Paris. J'ai ensuite fréquenté l'école Estienne d'arts graphiques et l’école Technique de Publicité de la rue Duperré. Et l'on m'a promis un poste de dessinateur maquettiste au siège social, boulevard Haussmann à Paris, à mon retour de l'armée. 


J'ai effectué mon service militaire en 1961 et 1962, planqué comme secrétaire du trésorier à l’État-major du 8ème Régiment d'Instruction des Transmissions au Mont-Valérien, tandis que la plupart de mes copains partaient pour l'Algérie. Je n'étais pourtant pas pistonné... 
 
Pendant mon service militaire, j'ai eu la douleur de perdre ma mère. Et lorsque j'ai été libéré, en janvier 1963, je me suis retrouvé seul et complètement démuni d'argent. 
J'ai donc intégré le siège de la Cellophane où j'ai dessiné des maquettes destinées à l'impression de sachets de nouilles ou de bonbons. 
Mais, au bout de quelques mois, me disant que l'avenir appartient à ceux qui acceptent de changer de trajectoire, je me suis fait engager, avec un salaire multiplié par deux et le titre ronflant d'inspecteur des ventes, par des agents de fabriques, Pierson Meunier & Cie, qui représentaient sur le continent africain des firmes, principalement hollandaises, exportant des produits tels que le lait condensé Bonnet Rouge, la marque alors la plus renommée en Afrique francophone. 


Je me suis révélé plutôt bon vendeur et n'ayant pas d'attaches familiales, j'ai voyagé dix mois sur douze pendant trois ans, tous frais payés, à travers l'Afrique Noire et à Madagascar. 
Jusqu'à ce que je me fasse débaucher par la direction de General Foods France (Kréma-Hollywood, Legal, Sulta) qui recherchait son responsable export sur les pays de la zone franc. Confortablement rémunéré, avec le statut de cadre, j'ai alors voyagé à longueur d'année autour du monde, Afrique, Océan Indien, Etats-Unis, Caraïbes, Océanie... 

Mon plus beau souvenir de ces périples restera le jour béni de novembre 1966 où j'ai fait la connaissance, au Congo, de l'exquise créature qui, un an plus tard, deviendra mon épouse, la femme la plus douce et la plus fidèle qu'un homme puisse rêver. 

Notre mariage à Pointe-Noire (Congo), le 25 novembre 1967

Nos deux enfants, Frédéric et Catherine naîtront respectivement en 1969 et 1972. 

J'ai ensuite souhaité cesser de bourlinguer pour me fixer en France. C'était le début des hypermarchés et je suis entré dans la Grande Distribution dont Mammouth était alors l'une des principales enseignes. J'y occuperai des fonctions de management durant 25 années riches en péripéties. 


Je n'ai jamais demandé la médaille du travail car finalement je trouve dans mes souvenirs tant de motifs de satisfaction et de fierté, qu'une vie comme celle que j'ai vécue porte en elle-même sa récompense. 

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J'aime : ma femme, mes enfants et mes petits enfants, les amis fidèles, les chats, la mer, les palmiers, la peinture figurative, les chansons des années cinquante et soixante, le bœuf bourguignon et le chocolat noir. 

Je déteste : être en retard, que l'on me salue en me serrant la main sans me regarder, l'hypocrisie, le désordre, les abats, le froid, la neige et les films d'horreur. 

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