03/12/2019

Boronali

Au salon des Indépendants de 1910, les critiques d'art découvrirent ce tableau intitulé "Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique" qui fit alors l'objet de commentaires parfois enthousiastes




D’après le catalogue de l’exposition, l’auteur en était un certain Joachim-Raphael Boronali, peintre né à Gênes, qui avait accompagné son tableau d'un manifeste sur l'Excessivisme dans lequel il affirmait que "l'excès en tout était une force" et appelait "à ravager les musées absurdes en piétinant les routines infâmes". 

A l’époque, des antagonismes existaient entre les peintres d'avant-garde, désignés sous l'appellation méprisante de "bande à Picasso" et les traditionalistes réunis autour de Roland Dorgelès, adversaires de la peinture abstraite, et qui estimaient que "si les artistes n'essayaient plus de reproduire le monde réel, sous une forme reconnaissable, il ne restait aucune possibilité de juger l'art.

Dorgelès et deux compères, André Warnod et Jules Depaquit mirent au point un canular resté fameux qu’ils dévoilèrent plus tard au journal L’Illustration en révélant, constat d'huissier à l'appui, que l'auteur du tableau se nommait en fait "Lolo", l'âne de Frédéric Gérard, dit "le père Frédé", patron du Lapin Agile, cabaret de Montmartre. 




La vedette du salon était donc un bourricot auquel on avait attaché un pinceau à la queue… Boronali étant l'anagramme d'Aliboron, le nom que Jean de La Fontaine avait donné à l’âne dans une de ses fables. 



Le père Frédé et son âne

La toile fut achetée par un collectionneur 20 louis d'or qui furent reversés par Dorgelès à l'orphelinat des Arts.
Mais l’affaire fit scandale chez les snobinards parisiens...