12/10/2021

Agathe

Quand j'étais môme, on jouait aux billes pendant la récrée sous le préau ou dans la cour de l'école communale. Je me souviens de parties acharnées de "tique-et-patte" dont le principe était de toucher la bille du joueur adverse pour la lui prendre. 
A l'époque, juste après la guerre, nos billes étaient le plus souvent en argile peinturlurée et seuls quelques fils à papa jouaient avec des "agates", objets de toutes mes convoitises.
 

Ces billes de grande valeur à mes yeux devaient leur nom, issu du latin achates (région de Sicile où sainte Agathe fut jadis martyrisée), à une variété de quartz calcédoine à structure veinée dont les zones diversement colorées sont formées le plus souvent de cornaline, de jaspe, d'améthyste, comprenant l'onyx ou l'obsidienne.



Par la suite, lors de mon premier voyage au Cameroun en 1964, j'ai rencontré une Agathe évoquée dans l'un de mes romans :
"Il se consommait beaucoup de bière Breda dans les bars-dancing de Douala. Et plus particulièrement chez Kontchupé qui avait une très bonne clientèle d'habitués et de gens de passage. Sa boîte se trouvait dans le quartier du port et tous les marins du monde en connaissaient l'adresse. Ils savaient y trouver des filles faciles qui venaient là pour danser et se faire payer un verre par un fiancé d’un soir. Avec son nez cabossé, ses yeux mi-clos en permanence et son crâne rasé, Kontchupé avait une véritable gueule de boxeur. C'était d'ailleurs une ancienne vedette du ring à l'époque de Charles Humez et Laurent Dauthuille, comme en témoignait une photo punaisée au mur de son bar, au dessus des rangées de bouteilles de whisky. De violentes odeurs de transpiration vous saisissaient dès l'entrée de sa boîte de nuit. Il y faisait une chaleur de four malgré les brasseurs d'air qui tournaient à plein régime au plafond. Avec la lumière tamisée, on ne voyait pas grand chose de la salle meublée de tables en formica sur lesquelles des photophores éclairaient des faces où ne brillaient que les dents et les yeux. Cinq ou six couples "domino", homme blanc et femme noire, dansaient sur la piste au son d'une rumba congolaise interprétée par un trio de musiciens plutôt doués. Une dizaine de filles étaient accrochées au comptoir derrière lequel officiaient le patron et sa serveuse Agathe, une maîtresse-femme fessue, à la peau d'ébène luisante. Vêtue d'un ample pagne en wax bariolé au décolleté plongeant et dont l'échancrure laissait à nu une épaule ronde et satinée, elle avait la tête auréolée de tresses en antennes, de grands yeux sombres et miroitants et une grande bouche aux lèvres molles peinturlurée d'un rouge violent qui faisait ressortir des dents éclatantes."

http://www.thebookedition.com/escales-africaines-francois-sobieraj-p-101217.html
https://www.thebookedition.com/fr/escales-africaines-p-101217.html



Enfin, je voudrais remercier ici l'adorable soignante de l'hôpital de Narbonne prénommée Agathe qui s'est si bien occupée de moi dernièrement. 


Une jolie infirmière blonde, si jeune qu'elle n'avait encore jamais entendu parler de "37.2 le matin", le célèbre film de Jean-Jacques Beineix sorti en 1986...