02/06/2019

Directives anticipées


Mises en place en 2005 par la loi Leonetti, c'est ce qui permet à toute personne majeure de préciser par écrit ses souhaits concernant sa fin de vie pour le jour où elle ne serait plus en mesure de les exprimer, à la suite par exemple d'un accident ou du fait de l'évolution d'une maladie incurable, ceci afin d'aider les médecins à prendre leurs décisions le moment venu.





A ce propos, j'aurais aimé avoir écrit ce billet de François Morel diffusé dernièrement sur France Inter : 
"Je sors du studio, je me fais écraser par une trottinette. Je suis hospitalisé, je deviens inconscient, incapable de m’exprimer. Heureusement, publiquement j’aurais, juste avant, donné mes directives anticipées. Vous saurez quoi faire de moi. 
Enfin, moi même, pour l’instant, en réalité, je ne sais pas trop. Je pourrais faire le fier à bras mental en disant "s’il m’arrive quelque chose, je veux tout de suite en finir". C’est facile à dire. Je suis aujourd’hui dans une forme éblouissante. Je lisais encore hier soir avant de m’endormir les résultats de mes derniers résultats hématologiques, ils sont excellents. Ma vitesse de sédimentation, ma numérotation globulaire, ma formule leucocytaire, tout est formidable, ce qui a fait dire à mon médecin traitant : "Monsieur Morel, vous êtes une véritable petite machine". 
En revanche, quand je serai au bout du rouleau, qui me dit que je n’aurais pas encore envie de voir défiler un tout petit peu les derniers morceaux du ruban de la vie, boire le verre jusqu’à la lie, profiter encore du souffle caressant d’une brise légère, d’un rayon de soleil qui se pose sur ma joue, d’une caresse, d’un frôlement, d’une marque de tendresse? 
"La vie ne vaut rien mais rien ne vaut la vie" comme chante André Malraux sur une musique d’Alain Souchon... Il est possible aussi que je me dise "Basta, suffit, j’ai fait mon temps. Arrêtons les frais." Débranche ! Comme chante France Gall sur des paroles de Michel Berger. 
Je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est que je détesterais qu’on fasse un prétexte pour idéologues. Ce que je sais, c’est que je détesterais qu’on me filme sur mon lit de douleur, qu’on me vole mes derniers moments d’intimité, qu’on impose à mes amis, à ceux qui m’ont connu, une dernière image qui ne correspond pas à celle que j’aurais envie de laisser. Ce que je sais, c’est que je détesterai qu’un avocat, abruti d’idéologie rance, se serve de moi pour distiller ses opinions frelatées en criant "remontada!" comme si je n’étais qu’un score victorieux d’une compétition sportive. Ce que je sais, c’est que je trouve curieux que ceux qui prétendent croire à la vie éternelle, veuillent à tous prix s’accrocher à la vie terrestre. Ce que je sais, c’est que le droit à "mourir dans la dignité" rejoint celui de vivre dans la dignité. Ce que je sais, c’est que je voudrais qu’on me laisse tranquille, que jusqu’au bout, on me respecte et qu’on ne me parle pas comme à un animal de compagnie, comme à un chien. Ce que je sais, c’est que les images filmées par la famille de Vincent Lambert et diffusées sur un site droitier m’ont paru indignes. Ce que je ne sais pas, c’est si Vincent Lambert, qui aimait la vie et le rock psychédélique, ressent toujours des émotions en écoutant Pink-Floyd."