- Bonjour, gai rossignol sauvage,
Puisqu’en Provence te voilà !
Tu aurais pu prendre dommage
Dans le combat de Gibraltar
Mais puisqu’enfin je t’ai ouï,
Ton
doux
ramage,
Mais puisqu’enfin je t’ai ouï,
M’a
réjoui.
–
Vous avez bonne souvenance,
Monsieur, pour ne pas m’oublier ;
Vous aurez donc ma préférence,
Ici je passerai l’été,
Je répondrai à votre amour
Par mon ramage
Et je vais chanter nuit et jour
Aux
alentours.
–
Je te donne la jouissance,
L’avantage de mon jardin ;
Au jardinier je fais défense
De te donner
aucun chagrin,
Tu pourras y cacher ton nid
Dans le feuillage
Et tu te trouveras fourni
Pour
tes
petits.
–
Je le connais à votre mine,
Monsieur, vous aimez les oiseaux ;
J’inviterai la
cardeline.
Pour vous chanter
des airs nouveaux.
La
cardeline
a un beau chant,
Quand elle est seule ;
Elle a des airs sur le plain-chant
Qui sont charmants.
Jusque vers le mois de septembre
Nous serons toujours vos voisins.
Vous aurez la
joie de m’entendre
Autant le soir que le matin.
Mais lorsqu’il faudra s’envoler
Quelle tristesse !
Tout le bocage aura le deuil
Du
rossignol.
–
Monsieur, nous voici de partance ;
Hélas ! c’est là notre destin.
Lorsqu’il
faut quitter la Provence,
Certes, ce n’est pas sans chagrin.
Il nous faut aller hiverner
Dedans
les Indes ;
Les hirondelles, elles aussi,
Partent
aussi.
–
Ne passez pas vers l’Amérique.
Car vous pourriez avoir du plomb
Du côté de la Martinique
On tire des coups de canon.
Depuis longtemps
est assiégé
Le roi d’Espagne :
De crainte d’y être arrêtés,
Au loin passez.
***